Des idées reçues sur le végétarisme

Le sujet végé peut fâcher ! Derrière les réflexions de l’entourage et même du corps médical sur le régime alimentaire strictement végétal, se cachent beaucoup d’idées reçues. 


 

Les végétariens manquent de protéines

 

L’image qui revient souvent, c’est que pour avoir du muscle, il faut consommer du muscle. Mais pour avoir des bons yeux, on ne va pas avaler des yeux et pour avoir de beaux cheveux, on ne va pas manger des cheveux ! Ce genre d’idées relève d’une sorte de pensée magique. Peu de gens savent d’ailleurs que nous ne prenons pas les protéines directement dans les aliments, mais que notre corps produit ses propres protéines à partir des acides aminés contenus dans notre alimentation. Et contrairement à un mythe répandu, les protéines d’origine végétale ne sont pas incomplètes et contiennent tous les acides aminés essentiels. 

 

Les protéines végétales peuvent satisfaire les besoins nutritionnels dès lors qu’une alimentation végétale variée est consommée et que les besoins en énergie sont satisfaits. 

 

C’est la position de l’Academy of Nutrition and Dietetics, qui rassemble, outre-Atlantique plus de 100 000 spécialistes de la nutrition.

 

En pratique : Quelques aliments végétaux riches en protéines (Pour 100 grammes d’aliments)

Graines de lupin et de courge : 36,17 et 30,23 grammes

Fèves : 26,12 grammes

Cacahuètes : 25,8 grammes

Lentilles : 24,63 grammes

Pois cassés : 23,82 grammes

Amandes : 21,15 grammes

Pois chiches : 20,47 grammes

 

En comparaison, la viande de bœuf contient, selon les morceaux, de 18 grammes à 30 grammes de protéines.


 

 

Les végétariens ont forcément des carences

 

Carences en calcium, en zinc, en fer, en vitamines… Le régime végétarien est généralement accusé de tous les manques. D’ailleurs, les végétariens et surtout les véganes sont souvent imaginés comme des personnes maigres, faibles, fatiguées. A tort !

 

Dès que l’on devient végétarien ou végane, le spectre des carences apparaît. Pourtant, la plupart des omnivores ont des connaissances limitées en matière de nutrition. Qui se soucie de ses apports quotidiens en iode, en oméga-3, en vitamines ou encore en calcium ? D’autre part, on sait que la viande est néfaste, elle est classée dans les aliments à risques par le dernier rapport de l’ANSES (agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation). Quant aux produits laitiers et au poisson, ils posent question. Les connaissances actuelles permettent donc de penser qu’on va être en meilleure santé en ne consommant pas de produits animaux. Remplacer le steak par des lentilles a de nombreux bénéfices. En mangeant des légumes, des fruits frais, des légumineuses et des céréales complètes, on aura une alimentation riche en antioxydants, en minéraux, en fibres… »

 

En pratique : Bien conçue, une alimentation végétarienne, y compris végétalienne, est saine, adaptée au plan nutritionnel et peut procurer des avantages pour la prévention et le traitement de certaines maladies. Elle est appropriée à toutes les périodes de la vie. 

 

C'est la position de l’Academy of Nutrition and Dietetics, publiée dans le numéro de décembre 2016 de sa revue. Parmi les sportifs végétariens célèbres, on peut citer par exemple en tennis les sœurs Williams ; Carl Lewis, titulaire de neuf médailles d’or en athlétisme aux Jeux Olympiques ; ou encore Bode Miller, médaillé olympique de ski alpin. 

 

Attention à l’iode et la vitamine B12

 

Seuls risques de carences possibles dans le cadre d’un régime végétarien et surtout végétalien : celles en iode et en vitamine B12. Des supplémentations sont recommandées.



 

L’homme a toujours mangé de la viande et du poisson

 

Mieux, il n’aurait pas survécu sans… Donc pourquoi changer ce régime alimentaire ?

 

L’alimentation est le seul domaine où on se revendique des habitudes des hommes préhistoriques ! Quand nous utilisons notre smartphone cinq heures par jour, que nous nous soignons lorsque nous sommes malades, que nous dormons dans un lit, nous ne nous revendiquons pas de nos ancêtres ! Des théories existent sur ce que la viande aurait apporté au développement du cerveau humain mais elles sont très controversées. Pour certains paléontologues, c’est le fait de chasser, de développer des stratégies, qui a permis de développer le cerveau. Pour d’autres, c’est celui d’avoir cuit la viande et d’avoir pu accéder à des quantités plus importantes de calories. Mais quand bien même, invoquer l’histoire pour justifier et décider de nos comportements présents n’est pas pertinent. Et si le naturel doit être un argument, que dire des élevages intensifs, des abattoirs et des milliards d’animaux qui sont élevés pour être tués ? Où est le naturel là-dedans ?.

 

En pratique : Une conversion parfois difficile

 

Et le rôti du dimanche midi ? Et la blanquette de veau de mamie ? Adopter une alimentation végétale, c’est remettre en question une part de notre culture culinaire, héritée de nos parents et de nos grands-parents. La difficulté, c’est d’arriver à se détacher de la dimension réconfortante de cette alimentation qui était préparée par notre famille. Bonne nouvelle : il est possible de revisiter tous les plats classiques à la sauce végétarienne ou végane ! 


 

 

Le végétarisme est une mode

 

Chacun de nous a, dans son entourage, des amis ou des connaissances qui décident d’arrêter de manger de la viande, du poisson ou tout produit venant des animaux. Le végétarisme et le véganisme semblent en plein essor. Au point que certains y voient un effet de mode. Pourtant, ce mouvement ne date pas d’hier. Un de ses premiers théoriciens ? Le philosophe et mathématicien grec Pythagore.

 

Le végétarisme est très ancien mais il a longtemps été marginalisé. Aujourd’hui, la nouveauté, c’est ce changement de regard. Le végétarisme et le véganisme sont beaucoup plus visibles, notamment dans les médias. Mais cet essor n’a rien d’une tendance passagère. C’est au contraire une tendance de fond. La consommation de viande diminue depuis des années en France et en Europe. Quant aux grands groupes de distribution, ils sont tous en train de développer des gammes végétariennes et véganes. 

 

Les défenseurs d’une alimentation végétarienne ont toujours existé. Pour comprendre les débats intellectuels autour du végétarisme depuis l’Antiquité, lire l’ouvrage Le végétarisme et ses ennemis, de Renan Larue (PUF).


 

 

Les végétariens ne prennent pas de plaisir à manger

 

«Mais tu manges quoi, alors, à part des légumes et des graines ? », « la cuisine végétarienne est triste, monotone »… L’image de végétariens ne mangeant que de la salade est encore bien ancrée dans les esprits.

 

Notre société est assez peu ouverte aux cultures alimentaires différentes. Contrairement au Royaume-Uni, par exemple, qui est un pays beaucoup plus multiculturel. Là-bas, les gens sont moins perdus lorsqu’ils invitent une personne végétarienne, ils ont une idée de plats à lui préparer. La culture culinaire française s’est construite autour des produits animaux. Une assiette carnée classique, c’est de la viande ou du poisson avec, autour, des petits accompagnements. La cuisine végétale, elle, a plusieurs centres. C’est un équilibre, une palette d’une multitude d’aliments, aux textures, couleurs et saveurs différentes. 

 

En pratique : Une cuisine très créative

Alain Passard, Joël Robuchon, Thierry Marx… De plus en plus de grands chefs s’intéressent à la cuisine végétale. Et pour cause : il existe mille et une façons de marier et d’accommoder les légumineuses, les céréales, les légumes, les oléagineux, les fruits, les graines.

 

Quelques blogs pour trouver l’inspiration : Une végétarienne presque parfaite, Happy veggie,  Antigone XXI, 100 végétal (Les recettes de Marie Laforêt, chef de file de la cuisine végane)...

 

 

 

Il faut forcément compenser et le risque, c’est de prendre du poids

 

Lorsqu’on arrête de manger de la viande ou du poisson, il est souvent tentant, pour être sûr de se sentir rassasié, de compenser avec un peu plus de fromage ou de pain. Résultat : des kilos supplémentaires ne tardent pas à apparaître.

 

En réalité, si on remplace les protéines animales par des protéines végétales, en mangeant des légumineuses ou des céréales complètes, on se rend compte qu’on perd plutôt du poids. L’IMC (indice de masse corporelle) des véganes est inférieur à celui des végétariens, qui est lui-même inférieur à celui des omnivores. 

 

En pratique : Un régime sain, oui…

Mais la junk food existe aussi version végétarienne ou végane !


 

 

Le soja, c’est mauvais

 

Riche en protéines, en fer et en calcium, le soja semble un substitut idéal à la viande. Mais accusé de participer à la déforestation de l’Amazonie et d’être potentiellement néfaste pour la santé, il fait polémique.

 

Le soja d’Amazonie sert à nourrir les animaux d’élevage. C’est à travers la consommation de viande que le plus de soja OGM est consommé. Celui-ci participe effectivement à la déforestation de l’Amazonie et nécessite de très grandes quantités d’énergie pour être transporté. Le soja utilisé pour la consommation humaine pousse dans le sud-ouest de la France ou en Europe. De préférence, mieux vaut l’acheter bio. Concernant les risques pour la santé, dans les dix dernières années, cinq études ont été menées à l’échelle mondiale sur le lien entre consommation de soja et cancer du sein. Toutes allaient dans le même sens et démontraient une réduction du risque de cancer, de récidive et de la mortalité pour les femmes ayant déjà eu un cancer du sein. 

 

En pratique : Varier les aliments

Varier et consommer de manière raisonnable tous les aliments est valable pour tous les régimes alimentaires, y compris végétarien et végétalien !


 

 

Devenir végétarien ne sert à rien

 

Les animaux continueront d’être tués pour être mangés, la planète, d’être polluée, alors finalement, devenir végétarien n’a pas tellement d’impact… Si ?

 

De nombreux arguments relèvent de cette “logique” selon laquelle si on ne peut pas faire quelque chose à 100%, il vaudrait mieux ne rien faire du tout. Ou reposent par exemple sur l’idée que c’est trop dur d’être végane : il faut chercher des pulls sans laine, donc autant continuer de manger le plus de viande possible. Pourtant, dans la plupart des domaines, nous essayons de faire de notre mieux : nous n’allons pas jeter des papiers partout dans la rue sous prétexte qu’on n’arrive pas à tout recycler. Ce sujet est compliqué, c’est certain, mais ne peut-on pas faire de notre mieux et chercher à réduire notre impact au maximum ? 

 

En pratique : Un régime meilleur pour l’environnement

 

La nouveauté dans le dernier rapport de l’Academy of Nutrition and Dietetics sur le végétarisme ? Une prise de position sur l’impact de « cette alimentation basée sur les plantes (qui) est plus soutenable au plan environnemental car elle utilise moins de ressources naturelles et est associée à moins de dégâts de l’environnement ». Selon le rapport de Foodwatch, une alimentation sans produits animaux émet de 7 à 15 fois moins de gaz à effet de serre qu'une alimentation qui contient de la viande et des produits laitiers.

 


 

Et la souffrance humaine ?

 

Se soucier du bien-être animal, est-ce vraiment une priorité quand on voit ce que les hommes, les femmes et les enfants peuvent subir à travers le monde ?

 

Cette idée relève d’une peur : celle que s’intéresser à la souffrance des animaux reviendrait à diminuer ou oublier celle des hommes. Mais se soucier des animaux n’empêche pas, bien au contraire, de considérer les humains. De nombreux penseurs véganes prônent un humanisme inclusif, qui s’intéresse à tous les êtres sentients, humains et animaux, tous méritant la considération et le respect. Lamartine disait : On n'a pas deux cœurs, un pour les animaux et un pour les humains. On a un cœur ou on n'en a pas. Des études de psychologie cognitive montrent d’ailleurs que lorsque l’on commence à changer son regard sur les animaux, à devenir antispéciste par exemple, on développe aussi des sentiments d’empathie pour les autres humains, on est aussi moins raciste, moins sexiste… 

 

En pratique : Une double souffrance

Difficile, lorsque l’on devient végétarien notamment pour des raisons éthiques et écologiques, de voir son entourage continuer à manger des animaux. Une fois que l’on a pris conscience de l’atroce souffrance animale et décidé d’arrêter d’y participer, on se dit que tout le monde va faire pareil. Mais beaucoup de personnes autour de nous ne vont pas changer leurs habitudes alimentaires et il faut vivre avec. Il s’agit d’admettre nos propres limites aussi : on ne peut pas changer tout le monde. En même temps, il faut avoir confiance car c’est le monde qui est en train de changer.

 

 


 

Pour aller plus loin

 

 

Qu’est-ce que le spécisme ? C’est une discrimination basée sur l'espèce, qui fait de l'espèce en soi un critère justifiant un comportement portant préjudice aux droits fondamentaux d'un être vivant (exploitation, violence, oppression ou meurtre).

 

Elodie Vieille-Blanchard est présidente de l’Association végétarienne de France, professeure agrégée de mathématiques et docteure en sciences sociales. Elle est co-auteure, avec René Laporte, de Faut-il arrêter de manger de la viande ? (éditions Le Muscadier).

 

Voir son steak comme un animal mort, de Martin Gibert, docteur en philosophie (Lux). “Derrière le consensus en éthique animale, il y a aussi un consensus scientifique : la plupart des animaux que nous exploitons, tuons et consommons ont des émotions, des préférences, des intérêts. Ils ont une vie qui leur importe. Il serait temps de prendre la mesure de nos responsabilités morales”.

 

Paroles pour les animaux, présentées par Théodore Monod, naturaliste (Albin Michel). “Les animaux ne demandent pas qu'on les aime, ils exigent qu'on leur foute la paix ».

 

Et deux BD pleines d'humour et d'esprit militant : Insolente Veggie - Une végétalienne très très méchante (Tome 1) et L'antispécisme, ce n'est pas pour les chiens (Tome 2), de Rosa B. (La Plage).


 

Source : https://www.psychologies.com/Nutrition/Etre-vegetarien/Regime-vegetarien/Articles-et-dossiers/9-idees-recues-sur-le-vegetarisme